Malgré le blocus imposé par les EAU, l’expansion économique qatarienne continue. Doha se pose en concurrent redoutable de Dubaï dans le secteur bancaire et financier.
Malgré le blocus imposé par ses voisins et sa petite taille, le Qatar demeure une puissance économique d’envergure au Moyen-Orient. Doha vient de le montrer une nouvelle fois en allouant 2 milliards de dollars américains pour attirer des entreprises multinationales sur sa place financière.
Les entreprises qui établiront un centre dans la capitale qatarienne bénéficieront de bureaux gratuits et d’incitations fiscales, ainsi que d’un capital d’amorçage pour couvrir cinq années de dépenses d’exploitation. Cela en échange d’un engagement d’au moins une décennie, a déclaré à Bloomberg TV Yousuf Al-Jaida, président de la Qatar Financial Centre Authority (QFCA).
« Nous nous attendons à ce que toutes les entreprises de QFC aient un accès complet aux appels d’offres du gouvernement et un accès illimité au marché local, qu’il s’agisse d’entreprises ou de détaillants », a expliqué M. Al-Jaida.
Cette annonce intervient alors que le Qatar et les EAU continuent de se livrer une bataille sans merci pour attirer les investissements étrangers et revendiquer le titre de principal centre financier de la région. Un terrain sur lequel le Qatar semble avoir une longueur d’avance.
Un bloc à l’impact limité
Malgré le blocus imposé par les EAU, Bahreïn, l’Égypte et l’Arabie saoudite, qui l’accusent de financer des groupes terroristes et d’entretenir des liens trop étroits avec l’Iran, le Qatar résiste et tire même un certain profit de la situation. Ainsi, « si l’activité économique [du Qatar]a été affectée, elle a été essentiellement transitoire et de nouvelles routes commerciales ont été rapidement établies. Le système bancaire s’est également adapté », expliquait en mars un rapport du Fonds monétaire international (FMI).
Si Dubaï maintient sa position de leader dans la région en tant que centre financier c’est en ayant rapidement transformé son économie pour s’adapter à la pression diplomatique de ses voisins comme le souligne Francis Perrin, chercheur associé à l’OCP Policy Center (Rabat) et directeur de recherche à l’IRIS (Paris) : « Doha a déployé de nouvelles routes commerciales ; la banque centrale qatarie a puisé dans ses immenses réserves pour soutenir les secteurs bancaire et financier ; et son activisme diplomatique lui a permis de s’assurer de la neutralité, voire de la bienveillance, des grandes puissances », affirme l’expert.
« Blocus inutile »
Un renversement de tendance semble par ailleurs exclu. Selon le quotidien The Peninsula Qatar, les bénéfices des sociétés qatariennes pour le troisième trimestre devraient augmenter de 21 % par rapport à l’année précédente. Les bénéfices globaux des sociétés devraient en outre progresser de 9 % par rapport au trimestre précédent. Le bénéfice global des banques qatariennes devrait quant à lui augmenter de 15 % par rapport à l’année précédente, tandis que le bénéfice net de la Banque commerciale du Qatar (CBQ) devrait être multiplié par 4,2 avec un provisionnement plus faible en glissement annuel et une croissance saine des bilans.
Des chiffres qui expliquent la conclusion implacable de Francis Perrin : « Un an près, le Qatar n’a donc pas plié et le quartet [Arabie saoudite, EAU, Égypte et Bahreïn] n’a quasiment rien gagné. L’opération est un fiasco et Riyad comme Abou Dhabi le savent. La question pour eux maintenant est de savoir comment sortir d’un blocus inutile et coûteux pour toute la région sans perdre la face »
Un commentaire
Tout en gardant en tête que les places financières au Moyen-Orient n’arrivent qu’à la cheville des grandes Bourses New yorkaise, européennes et asiatiques, ce mouvement en faveur de Doha est une bonne chose. Dubaï n’est qu’un pion dans la main des Saoudiens et le Qatar a montré qu’il ne se plierait pas aux diktats de l’Arabie Saoudite. Quitte à choisir, mieux vaut que le Qatar se renforce au détriment de Doha et des autres jouets saoudiens. Cela sera bénéfique pour la paix dans la région et même en Europe.