La filière aéronautique française est très affectée par la crise sanitaire et la chute du trafic aérien mondial. Les plans sociaux se multiplient en région, où les sous-traitants d’Airbus sont à la peine. Mais des initiatives germent sur tout le territoire pour aider les salariés du secteur à trouver de nouveaux débouchés, à l’image d’EDF, qui propose près de 200 postes à fortes compétences industrielles.
La décision est tombée le 7 décembre : le Salon international de l’aéronautique et de l’espace de Paris (SIAE), qui se tient tous les deux ans au Bourget, n’aura pas lieu en 2021. La 54e édition de l’évènement, qui devait se tenir du 21 au 27 juin prochain, est donc reportée à l’été 2023. Dans un communiqué, le conseil d’administration du SIAE explique s’être « rendu à cette décision inéluctable compte tenu de la situation sanitaire internationale et de la fréquentation » attendue, la dernière édition du Salon du Bourget ayant drainé quelque 140 000 visiteurs professionnels et 177 000 badauds. Une énième annulation qui illustre la profonde crise touchant le secteur aéronautique, le transport aérien mondial ayant, en 2020, chuté de 90% et l’activité des constructeurs de l’ordre de 50% par rapport à l’année précédente.
Plans sociaux en cascade
Sans surprise, c’est à une véritable réaction en chaîne que l’on assiste dans un secteur confronté à la plus grave crise de son histoire. Alors que l’américain Boeing a annoncé la suppression de 30 000 postes, son concurrent européen, Airbus, qui avait dès le mois d’avril tablé sur une baisse de 40% de sa production, a quant à lui annoncé la suppression de 15 000 emplois. Des mauvaises nouvelles qui, pour être attendues, n’en fragilisent pas moins toute une filière aux abois. Dans le nord de la France, ce sont ainsi 800 salariés de plusieurs dizaines de sous-traitants d’Airbus, dont sa filiale Stelia Aerospace, qui devraient bientôt perdre leur emploi, plongeant les habitants de la commune d’Albert (Hauts de France) dans le désarroi. Mais c’est bien dans le sud du pays, en région Occitanie, où se situe le berceau historique de l’aéronautique française, que les conséquences de la crise se font le plus douloureusement sentir.
A Blagnac, près de Toulouse, l’entreprise de services d’ingénierie aéronautique Akka Technologies a annoncé, début novembre, envisager la suppression de 1 150 postes, sur les quelque 2 200 que compte le site. Et ce, en dépit du fait que plus de la moitié des salariés bénéficie depuis mars dernier des mesures de chômage partiel. Non loin de là, à Labège, ce sont les salariés du groupe Latelec, spécialisé dans le câblage aéronautique, qui se sont mis en grève au début du mois de décembre pour dénoncer la vague de licenciements menaçant près de 130 postes : « ça va être compliqué de retrouver du travail dans ce secteur d’activité », déplore l’un d’entre eux. En effet : depuis le début de l’année, les chiffres du chômage ont augmenté de +4% dans la région, et même de +7% en Haute-Garonne, l’un des départements français où sont implantées la plupart des sites industriels aéronautiques.
EDF solidaire de l’industrie aéronautique occitane
En Occitanie, qui concentre 27% des effectifs de la filière aéronautique en France métropolitaine, et ailleurs, les salariés du secteur sont-ils donc condamnés à rejoindre la cohorte des demandeurs d’emplois ? Pas nécessairement, s’ils acceptent de rechercher des débouchés dans d’autres secteurs industriels où leurs compétences sont appréciées, comme le ferroviaire, la défense ou encore le nucléaire. Malgré les mauvais chiffres du chômage en Occitanie, Serge Lemaître, le directeur régional de Pôle Emploi, se veut optimiste, évoquant la « bonne nouvelle » que représentent les opportunités proposées par la région dans des secteurs comme l’agroalimentaire, qui a localement de nombreux besoins de recrutements, ou celui de la santé/gériatrie, où l’on « manque de personnels de soins, infirmières, aides-soignantes ».
Et comme de l’aéronautique à l’électrique, il n’y a qu’un pas, EDF encourage lui aussi la mobilité professionnelle des salariés du secteur affectés par la crise. Le groupe a identifié les compétences communes à la filière aéronautique et électrique, et propose plus de 200 offres d’emploi aux salariés de groupes aéronautiques comme Airbus, Liebherr, Safran ou encore Daher, via un site jobboard dédié. Ces postes concernent les domaines de l’électromécanique/électronique/électricité, de la soudure/chaudronnerie et de la gestion de projets ou d’affaires. Le projet, initié en Occitanie, qui concentre 27% des effectifs de la filière aéronautique, s’étend aux autres régions concernées par la crise. « Je suis fier de la mobilisation et de la capacité d’innovation de la filière RH au sein du Groupe EDF. Nos valeurs de service public, d’engagement et de solidarité prennent encore là tout leur sens » a réagi Christophe Carval, Directeur RH EDF. Un bel exemple de solidarité inter-industries, qui rencontre un joli succès, EDF ayant d’ores et déjà reçu plus de 650 candidatures.
Profiter de la crise pour inventer l’avion du futur
D’autres initiatives germent pour aider la région Occitanie à se relever. BPI France et l’Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM) viennent ainsi de lancer « Rebond Industrie », un programme d’accompagnement de patrons de PME locales visant à « identifier les leviers de la reprise et adapter le modèle économique au nouveau contexte » post-Covid. Et, le 24 novembre, la Région a dévoilé, en partenariat avec la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) et le groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (Gifas), un nouveau « fonds d’impulsion », doté de 50 millions d’euros, à destination des entreprises locales du secteur. Objectif revendiqué : inventer l’avion de demain. « On doit profiter de cette crise », résume la présidente de l’exécutif régional, Carole Delga.