Le président de la République, Emmanuel Macron, l’a annoncé en février dernier : dans les prochaines années, le parc nucléaire français devrait compter 14 nouveaux réacteurs, qui s’ajouteront aux 56 installations déjà en activité. Pour répondre à ces objectifs, EDF, l’un des plus gros employeurs du pays, a engagé une large campagne de recrutement.
Le président de la République, réélu au mois de mai dernier, l’avait annoncé quelques mois auparavant, dans son « discours de Belfort » : « Il nous faut reprendre le fil de la grande aventure du nucléaire civil en France ». Ceci, non seulement en maintenant les centrales déjà en activité (56 réacteurs), mais également en en construisant de nouvelles.
Le nucléaire, qui représente 70 % de la production électrique dans l’Hexagone, présente un bilan carbone quasiment neutre (1 KWh nucléaire français émet moins de 4g de CO2 selon la Société française d’énergie nucléaire), peu cher, et, par définition, local. Ce qui en fait un atout de choix pour piloter les dossiers de la transition écologique, d’un côté, et de l’emploi, de l’autre. Car, si l’industrie nucléaire est le troisième employeur tricolore, derrière l’aéronautique et l’automobile, les besoins en professionnels qualifiés iront croissant, dans les prochaines années.
Les acteurs du nucléaire à la recherche de compétences multiples
Pour répondre aux enjeux de la filière nucléaire, le groupe EDF a pour ambition de recruter 7 500 salariés en France dans le domaine du nucléaire sur la période 2022 – 2024. Un défi, car comme beaucoup d’autres secteurs, le Groupe fait face à une « pénurie de compétences ». En cause, notamment : le manque d’intérêt des Françaises et des Français pour les métiers industriels. Selon un baromètre réalisé en avril dernier par L’Usine Nouvelle, la pénurie de compétences est effectivement le deuxième frein identifié à la croissance de l’industrie.
Pourtant, les besoins chez les professionnels du nucléaire sont multiples « Dans le cadre d’une activité stable, la filière [du nucléaire]recrutera 22 000 personnes d’ici à la fin 2023. Des ingénieurs, mais surtout des postes à niveau de qualification inférieure : des chaudronniers, des soudeurs, des mécaniciens, des électriciens », explique Cécile Arbouille, du Groupement des industriels français de l’énergie (GIFEN). Autant de métiers dans lesquels il y a « de vraies tensions » selon elle.
Emmanuel Macron table sur 14 nouveaux réacteurs dans les prochaines années –, « on a calculé qu’il fallait 10 000 personnes supplémentaires par paire de réacteurs » précise Cécile Arbouille. Quant au groupe EDF, il « recrute cette année 3 300 collaboratrices et collaborateurs dans le nucléaire pour répondre aux enjeux de la transition énergétique. Travailler dans le nucléaire, c’est s’ouvrir les portes vers une carrière passionnante, avec des postes, dans toute la France, sur des sites, en région, où il fait bon travailler et où son travail a du sens », rappelle Christophe Carval, Directeur Exécutif chargé de la direction des ressources humaines.
Pour contribuer à attirer les talents, la filière mise sur une représentation renforcée dans les écoles et les formations. « On parle très peu du nucléaire à l’école et dans les cursus de formation, alors, forcément, on a beaucoup de difficultés de recrutement de préparateurs, de soudeurs et d’ingénieurs », fait savoir Ludovic Caillet, le directeur régional de Fives Group. « C’est technique, manuel, il faut plus de deux ans de pratique pour être bon », estime-t-il.
Donner envie d’intégrer la filière dès la 3ème
Résultat : le manque de candidats formés se fait sentir. Pour pallier cette pénurie et se préparer aux besoins de demain, les responsables des ressources humaines du parc nucléaire et thermique d’EDF veulent donner envie aux plus jeunes de rejoindre la filière, notamment à travers des stages de découverte. Chez EDF, on s’attend donc à une « campagne soutenue ». Et celle-ci pourrait bénéficier du changement d’image que connaît le nucléaire depuis quelques années. Avec l’arrivée, dans le débat public, des préoccupations liées au réchauffement climatique – et à la nécessité de moins produire, ou produire « mieux » –, le nucléaire jouit d’un retour en grâce dans les médias… Bas carbone, contrairement aux énergies fossiles (charbon, gaz, pétrole), l’atome est désormais cité comme l’une des solutions phares au problème de réchauffement climatique.
Cette contribution du nucléaire aux objectifs de neutralité carbone est une chance inouïe, veulent croire certains, d’attirer davantage de candidats, et de faire face aux énormes besoins de compétences. L’énergéticien tricolore n’hésite pas à mettre en avant cette « filière engagée », capable de donner du « sens » au quotidien. « Quand on travaille dans le nucléaire, on participe à la décarbonation [de l’industrie]. Mieux […], on œuvre concrètement à la transition énergétique » : l’atome permet, pour rappel, de produire « une électricité à 91 % sans émission de CO2 et à la neutralité carbone en 2050 », rappelle EDF.
Ceux qui font le choix d’une carrière dans le nucléaire semblent y trouver leur compte : « il y a deux fois moins de turnover [dans le nucléaire]que dans les autres filières industrielles », avance Cécile Arbouille, qui parle d’une véritable « fierté à travailler » pour produire de l’électricité pour les Françaises et les Français.
D’ailleurs, tout au long de l’année, les équipes d’EDF accueillent des visiteurs, vont à la rencontre des collégiens, lycées et cursus de formation en BAC +2, +3 et +5. « En suscitant des vocations, notamment chez les jeunes femmes, EDF prépare les nouvelles générations à construire un mix énergétique neutre en CO2. », souligne Christophe Carval.