La vague de faillites qui frappe les entreprises françaises depuis 2022 continue de faire des ravages. En 2024, plus de 60 800 chefs d’entreprise ont perdu leur emploi, selon une étude de l’Observatoire de l’emploi des entrepreneurs. Une hausse alarmante de 18 % par rapport à 2023, qui pourrait encore s’aggraver cette année.
Un niveau inédit depuis 2015
Le constat est sans appel : 60.852 entrepreneurs ont vu leur activité s’effondrer cette année, un chiffre qui n’avait plus été atteint depuis 2015. L’étude, réalisée par l’association GSC – spécialisée dans la protection chômage des chefs d’entreprise – et le cabinet Altares, met en lumière l’ampleur de la crise. Cette explosion des pertes d’emploi s’explique par l’augmentation des procédures collectives : en 2023, pas moins de 67.830 entreprises ont connu une sauvegarde, un redressement ou une liquidation judiciaire, soit une hausse de 17 % en un an.
Les secteurs les plus touchés
Certains secteurs d’activité sont particulièrement fragilisés. La construction enregistre une augmentation de 23,7 % des pertes d’emploi des dirigeants, les agences immobilières subissent une envolée de 34,7 %, et le domaine des transports et de la logistique connaît une hausse de 29,3 %. Ces secteurs, fortement dépendants de la conjoncture économique, pâtissent de la fin des mesures de soutien public mises en place pendant la crise sanitaire.
La fin des aides d’État et des incertitudes économiques
La période post-Covid a marqué un tournant. Si les aides publiques avaient permis de limiter les faillites en 2020 et 2021, leur suppression progressive a conduit à un rattrapage brutal. En parallèle, l’instabilité économique et géopolitique alimente les difficultés des entreprises. « Les liquidations judiciaires dominent et privent plus de 60.000 dirigeants d’emploi en 2024, avec une tendance qui risque de s’aggraver en 2025 », alerte Thierry Millon, directeur des études d’Altares.
Les tribunaux de commerce confirment cette dynamique. À Paris, par exemple, le nombre de procédures collectives a grimpé de 19 % cette année, preuve que la crise touche de plein fouet les petites et moyennes entreprises.
Les petites structures en première ligne
L’étude révèle que les entreprises de petite taille sont les plus vulnérables. Près de trois quarts des entrepreneurs impactés dirigeaient une très petite entreprise (TPE) de moins de trois salariés. Les dirigeants de structures employant entre six et neuf salariés subissent une hausse record de 30,2 % des pertes d’emploi. Les artisans commerçants (+18,3 %) et les professions libérales (+16,6 %) sont également en difficulté, tandis que les patrons de grandes entreprises (plus de 50 salariés) semblent mieux résister, avec une baisse de 19,8 % des pertes d’emploi.
Autre donnée marquante : les entreprises les plus anciennes ne sont pas épargnées. Près d’un tiers des entrepreneurs concernés étaient à la tête d’une société existant depuis plus de dix ans. De plus, les dirigeants de plus de 60 ans subissent une augmentation significative de 33,2 % des pertes d’emploi.
Des territoires particulièrement exposés
Certaines régions sont plus durement touchées que d’autres. L’Île-de-France, la Normandie et les Pays de la Loire enregistrent des hausses supérieures à 25 %, accentuant les disparités territoriales face aux difficultés économiques.
Prévenir plutôt que subir
Face à cette montée des faillites, les experts insistent sur la nécessité d’une gestion plus proactive des risques. « Il est crucial d’informer les chefs d’entreprise sur les dispositifs de sécurité financière à leur disposition », souligne Hervé Kermarrec, président de la GSC. L’association rappelle ainsi l’existence d’un contrat d’assurance chômage destiné aux entrepreneurs, mis en place dès 1979 sous l’égide des organisations patronales Medef, CPME et U2P.
Alors que 2025 s’annonce déjà comme une année difficile, la prévention et l’accompagnement des dirigeants en difficulté pourraient être des leviers essentiels pour limiter l’hécatombe.