En 2024, les actionnaires des entreprises du CAC 40 ont touché un montant historique de dividendes et de rachats d’actions, atteignant près de 100 milliards d’euros. Malgré un contexte économique morose et des résultats en demi-teinte pour certaines sociétés, les distributions aux investisseurs ont battu un nouveau record, confirmant une tendance à la hausse amorcée depuis plusieurs années.
Selon les données publiées par la lettre spécialisée Vernimmen, les 40 plus grandes entreprises françaises ont distribué 98,2 milliards d’euros à leurs actionnaires, dépassant ainsi le précédent record de 97,2 milliards établi en 2023. Cette somme se décompose en 72,8 milliards d’euros versés sous forme de dividendes en numéraire et 25,5 milliards d’euros consacrés à des rachats d’actions. Bien que les rachats d’actions aient légèrement diminué par rapport à 2023 (30,1 milliards d’euros), ils restent à un niveau élevé, contribuant à augmenter le bénéfice par action et à soutenir les cours de Bourse.
Une concentration des richesses parmi les géants industriels
Comme les années précédentes, les distributions sont largement dominées par quelques poids lourds du CAC 40. TotalEnergies arrive en tête avec 14,6 milliards d’euros redistribués à ses actionnaires, suivi de LVMH (6,9 milliards d’euros) et de Stellantis (6,7 milliards d’euros). À eux seuls, ces trois groupes représentent près de 30 % du total des distributions, illustrant la concentration des richesses parmi les plus grandes multinationales françaises.
Pourtant, 2024 n’a pas été une année faste pour toutes ces entreprises. Le CAC 40 a enregistré une baisse de 2 % sur l’année, reflétant des résultats économiques mitigés. Les bénéfices cumulés des entreprises du CAC 40 ont atteint 145 milliards d’euros, en recul par rapport aux 153 milliards de 2023. Certains groupes, comme Stellantis, ont vu leur performance se dégrader significativement. Le constructeur automobile a ainsi enregistré une chute de 27 % de son chiffre d’affaires au troisième trimestre 2024, tandis que sa marge opérationnelle pourrait tomber à 7 %, contre plus de 14 % il y a quelques mois.
Une priorité donnée aux actionnaires, malgré les difficultés
Malgré ces résultats en baisse, les actionnaires du CAC 40 continuent de bénéficier de distributions généreuses. Certaines entreprises ont même augmenté leurs promesses de dividendes pour rassurer les investisseurs. C’est le cas de TotalEnergies, dont le résultat net a chuté de 39 % en 2024, à 2,3 milliards de dollars. Malgré cela, la direction a annoncé en novembre 2024 que le retour aux actionnaires dépasserait 45 % du cash-flow, contre 40 % initialement prévu.
Cette stratégie, qui consiste à privilégier les actionnaires même en période de ralentissement économique, soulève des questions sur la financiarisation croissante de l’économie. Alors que certaines entreprises voient leur profitabilité diminuer, elles continuent de redistribuer des sommes colossales à leurs investisseurs, parfois au détriment d’investissements à long terme ou de la rémunération des salariés.
Une tendance qui interroge
Le record de distributions de 2024 intervient dans un contexte économique incertain, marqué par des tensions géopolitiques, une inflation persistante et un ralentissement de la croissance mondiale. Malgré ces défis, les actionnaires du CAC 40 ont une nouvelle fois été gâtés, confirmant une tendance qui semble s’inscrire dans la durée. Cependant, cette priorité accordée aux rendements financiers immédiats pourrait, à terme, poser des questions sur la résilience et la durabilité des modèles économiques de ces grandes entreprises.
Alors que les dividendes et les rachats d’actions atteignent des sommets, le débat sur la répartition des richesses et la responsabilité sociale des entreprises reste plus que jamais d’actualité.
